Lutte contre la contrefaçon : comment protéger sa marque ?

La contrefaçon est un fléau mondial qui impacte aussi bien l’économie que la sécurité des consommateurs. Selon l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economiques), le commerce de produits contrefaits représente près de 3,3 % du commerce mondial, touchant tous les secteurs : luxe, électronique, pharmaceutique, pièces automobiles, etc.

Face à cette menace, la douane joue un rôle central dans la détection et la saisie des marchandises contrefaites. Mais la protection efficace d’une marque commence bien en amont : les titulaires de droits doivent agir pour permettre aux douanes d’intervenir.

Qu’est-ce qu’une contrefaçon ?

Une contrefaçon correspond à la reproduction, imitation ou utilisation totale ou partielle d’un droit de propriété intellectuelle sans l’autorisation de son titulaire, dans le but de faire passer le produit pour authentique. La propriété intellectuelle confère un monopole légal : violer ce monopole, c’est commettre une contrefaçon qui constitue un délit civil et pénal.

Pour être qualifié de contrefaçon, il ne suffit pas de copier. Il faut que la copie affirme ou laisse présumer qu’il s’agit de l’original. C’est l’intention de créer une confusion dans l’esprit du consommateur (marquer un produit contrefait avec un logo ou une marque connue) qui caractérise le délit.

Ce n’est pas la qualité de la copie qui importe, mais la finalité. Même une imitation imparfaite peut être une contrefaçon si elle crée une confusion d’identité ou d’origine. Inversement, une copie très fidèle sans intention trompeuse peut tomber sous une autre qualification (concurrence déloyale par exemple).

Il existe plusieurs types de contrefaçons :

TypeDescription
MarqueUtilisation non autorisée d’un logo ou d’un nom déposé sur des produits ou services
BrevetsReproduction ou mise en œuvre d’une invention protégée sans consentement
Droits d’auteurReproduction, diffusion ou usage d’œuvres (musique, littérature, logiciels …) sans accord
Dessins & modèlesUsage non autorisé d’un design protégé sur un objet ou produit
Logiciels & bases de donnéesCopie illégale de logiciels ou extraction illégale de données

Le rôle des douanes dans la lutte contre la contrefaçon

Les douanes sont en première ligne pour empêcher l’entrée sur le territoire de produits contrefaits. Leur rôle dépasse largement la simple collecte de droits de douane : elles assurent aussi la protection de l’économie légale, des consommateurs, de la santé publique et de la sécurité.

Les contrefaçons peuvent présenter des risques graves : jouets non conformes, cosmétiques toxiques, pièces mécaniques défectueuses, faux médicaments … Leur circulation menace à la fois les entreprises légitimes et la sécurité des citoyens.

Les autorités douanières disposent de 3 moyens pour lutter contre la contrefaçon :

Des contrôles ciblés aux frontières

Les services douaniers français et européens ont la capacité de contrôler les flux de marchandises aux frontières extérieures de l’Union Européenne, ainsi que dans les zones franches, ports et aéroports.

Les agents utilisent des techniques de ciblage avancé : analyse documentaire des déclarations d’importation ; profilage de risques selon l’origine, le type de marchandise, le déclarant, etc ; scanners à rayons X pour visualiser le contenu des conteneurs ; contrôles physiques inopinés.

Les marchandises en provenance de zones à haut risque (Asie du Sud-Est, Moyen-Orient, etc.) font l’objet d’une vigilance particulière.

La retenue douanière en cas de suspicion

Lorsque des agents suspectent une marchandise d’être contrefaite, ils peuvent procéder à une retenue douanière, c’est-à-dire une immobilisation temporaire des biens.

Ce mécanisme, encadré par le règlement (UE) 608/2013, permet à la douane de notifier le titulaire du droit de propriété intellectuelle (le détenteur de la marque par exemple), lui transmettre photos, documents et caractéristiques du produit, et lui laisser un délai de 10 jours (3 pour les biens périssables) pour confirmer la contrefaçon ou non. Durant cette période, la marchandise ne peut pas circuler, être vendue ni être réexportée.

La saisie et la destruction des marchandises

Si le titulaire du droit confirme qu’il s’agit d’une contrefaçon, la douane peut procéder à une destruction simplifiée, sans procédure judiciaire (si l’importateur ne s’y oppose pas) ou une procédure contentieuse (civile ou pénale), dans les cas litigieux ou complexes.

En 2023, la douane française a saisi plus de 10 millions d’articles contrefaits, un chiffre en constante augmentation notamment en raison du commerce en ligne.

Comment protéger sa marque auprès de la douane ?

Pour que la douane puisse intervenir efficacement, il est crucial que le titulaire de droits dépose une demande d’intervention douanière (DID). Ce document permet aux agents douaniers d’avoir accès à toutes les informations utiles sur la marque à protéger.

En tant que titulaire de droits (marque, brevet, dessin/modèle), vous pouvez déposer une DID en ligne via le portail IPEP (IP Enforcement Portal).

Dans cette demande, vous devrez fournir :

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  • Une preuve de votre droit de propriété intellectuelle (certificat INPI ou EUIPO)
  • Une description détaillée des produits authentiques et des signes distinctifs
  • Des exemples de contrefaçons déjà identifiées (si disponibles)
  • Des coordonnées pour être contacté rapidement en cas de retenue

Les douanes françaises proposent un pas à pas pour effectuer votre demande ici.

Bon à savoir : La DID est valable 1 an et peut être renouvelée. Elle est gratuite et peut couvrir plusieurs pays de l’UE.

Les douanes sont des partenaires clés dans la lutte contre ce fléau, à condition que les titulaires de droits s’impliquent activement. Le dépôt d’une demande d’intervention douanière, associé à une stratégie de propriété intellectuelle bien pensée, permet de détecter, bloquer et détruire les contrefaçons avant qu’elles n’atteignent le marché.

Egalement, certaines grandes marques organisent des sessions de formation avec les douanes pour aider les agents à mieux reconnaître leurs produits (étiquetage, emballage, numéros de série, etc.). C’est une bonne pratique qui augmente l’efficacité des contrôles.

Les bonnes pratiques pour protéger sa marque

Outre la demande d’intervention douanière, plusieurs démarches peuvent renforcer la protection de votre marque face à la contrefaçon :

  • Enregistrer sa marque dans tous les pays où l’on exporte : L’enregistrement de la marque est la condition préalable à toute action en douane. Il est donc essentiel de protéger sa marque au niveau national (INPI), européen (EUIPO) ou international (OMPI) selon les marchés ciblés.
  • Surveiller les marketplaces et réseaux sociaux : La contrefaçon passe souvent par des ventes en ligne. Utilisez des outils de veille automatisée (comme Red Points, Incopro, ou MarkMonitor) pour identifier les vendeurs suspects sur Amazon, AliExpress, ou les réseaux sociaux.
  • Engager des actions juridiques contre les récidivistes : Les douanes peuvent transmettre les dossiers aux tribunaux. N’hésitez pas à engager des actions civiles ou pénales contre les importateurs ou distributeurs de contrefaçons. Cela envoie un signal fort de tolérance zéro.
  • Sensibiliser vos partenaires : Fournisseurs, distributeurs, franchisés : tous doivent être informés des risques liés à la contrefaçon. Intégrez des clauses de protection de la propriété intellectuelle dans vos contrats.

FAQ

Oui, dans certains cas, la douane peut procéder à une intervention d’office, mais celle-ci est limitée. Pour une protection optimale, il est fortement recommandé de déposer une DID.

Oui. L’importation, la détention ou la vente de produits contrefaits est une infraction, même en cas d’ignorance. La bonne foi peut atténuer la peine, mais ne vous exonère pas de responsabilité.

La contrefaçon est un délit reconnu tant au code de la propriété intellectuelle qu’en droit pénal.

  • Sanctions pénales : jusqu’à 5 – 7 ans d’emprisonnement et 300 000 € à 750 000 € d’amende selon les cas
  • Sanctions civiles : confiscation, destruction des produits, dommages-intérêts pour le titulaire
  • Sanctions douanières et administratives : confiscation des contrefaçons au port/aéroport + amende égale à 1 à 2 fois la valeur du produit

Une simple copie sans but commercial trompeur ne déclenche pas de telles sanctions.


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